Jeudi 08 Juin 2023
A l'issue de la conférence flash qui s'est tenue le 24 mars 2023 avec les établissements de santé habilités Mers-CoV, trois spécialistes – virologues et épidémiologiste – des grippes zoonotiques synthétisent leurs points de vues sur le risque pandémique lié à ces pathologies.
Les virus influenza H5Nx, risque pandémique ?
Bruno Lina, virologue, CNR des virus respiratoires, surveillance génomique
Evaluation du risque en santé publique et surveillance
Sibylle Bernard Stoecklin, Épidémiologiste dans l'unité vaccination et infection respiratoire département maladies infectieuse de Santé publique France
L'influenza aviaire chez les animaux
Les virus influenza H5Nx, risque pandémique ?
Bruno Lina, virologue, CNR des virus respiratoires, surveillance génomique
- A ce jour, il n'y a pas de risque de pandémie sauf en cas d'acquisition d'une capacité à infecter des voies respiratoires aériennes supérieures.
- Délai d'incubation : 2 à 5 jours (plutôt court), maximum 7 jours.
- Au départ signes cliniques évocateurs : fièvre, diarrhée, et les signes classiques de grippe (fatigue, céphalées), parfois tableaux neurologiques avec les nouveaux H5N1 (convulsions).
- Signes respiratoires se dégradant très rapidement (dyspnée tachypnée, douleur thoracique…).
- Pneumonie radiologique en général J5 après le début des symptômes.
- Leucopénie, lymphopénie, thrombopénie, de mauvais pronostic.
- Prélèvements respiratoires à répéter :
- endotrachéal et sous-glottique pour le diagnostic
- nasopharyngé et oro-pharyngé pour identifier des évolutions virales
- selle et sanguins pour le pronostic
- Technique diagnostique de référence : RT PCR
- Prise en charge du patient : oseltamivir le plus rapidement possible
- Niveau de circulation très élevé avec différents lignages.
- Non transmissibles à l'homme, hors exposition massive.
- Portage silencieux chez différents oiseaux/mammifères ? (Détection sans séroconversion).
- Stabilisation des caractéristiques d'adaptation à l'être humain. Certains marqueurs d'adaptation identifiés
- Les données sur les virus historiques ne sont plus valables.
- Risque de réassortiment à ne pas sous- ni sur-estimer.
- Surveillance one-health indispensable avec un monitoring des virus circulants.
Evaluation du risque en santé publique et surveillance
Sibylle Bernard Stoecklin, Épidémiologiste dans l'unité vaccination et infection respiratoire département maladies infectieuse de Santé publique France
- Les détections de virus H5N1 H5N8 chez les humains depuis 2021 ont comme point commun l'exposition à des oiseaux domestiques infectés mais il y a un large spectre de symptômes et de niveaux de gravité.
- Aucune transmission inter-humaine n'a été décrite et les cas documentés chez l'homme sont rares au regard de l'intensité de l'épizootie. L'analyse de risque des structures de veille internationales estime que le risque d'infection humaine par ce virus et pour les grippes zoonotiques reste faible.
- Malgré tout, la recommandation est de renforcer la surveillance des virus influenza à l'interface animal homme et de sensibiliser les personnes exposées aux animaux infectés ainsi que les cliniciens à la situation actuelle.
- En France : une surveillance passive a été mise en place, tout clinicien prenant en charge une susception de grippe zoonotique correspondant à une définition de cas doit notifier l'ARS pour un classement du cas.
Infection respiratoire aiguë + exposition à risque = test RT-PCR
ciblant grippe saisonnière (sous-typage) et covid-19 pour le diagnostic différentiel
(la survenue de signes neurologiques est possible compte-tenu des données cliniques actuelles en santé animale)
(la survenue de signes neurologiques est possible compte-tenu des données cliniques actuelles en santé animale)
- Rappel sur l'exposition à risque (en l'absence de mesures de protection adaptées) : oiseaux domestiques, vivants ou morts ; oiseaux sauvages, malades ou morts ; porcs ou sangliers, vivants ou morts ; mammifères sauvages (terrestres ou marins) malades ou morts ; environnement contaminé (air, litière, déjections..) ; cas humain confirmé ; prélèvement/matériel biologique contaminé.
L'influenza aviaire chez les animaux
Béatrice Grasland, chef de l'unité virologie immunologie parasitologie aviaire et cunicole, responsable du LNR pour l'influenza aviaire de l'ANSES
- La multiplication de l'influenza aviaire (H5N1 actuel) chez les oiseaux est une multiplication respiratoire et digestive, différente de chez les mammifères ; chez les oiseaux récemment infectés, les signes neurologiques sont particulièrement importants.
- Les réservoirs de ces virus sont les oiseaux sauvages d'eau et la transmission peut être directe (par aérosols) ou indirecte (excrétions ou environnements souillés).
- Les virus influenza peuvent évoluer de deux manières différentes : en mutant progressivement avec des multiplications ponctuelles ou par réassortiments.
- Le virus lié à une lignée A/goose/Guangdong/1 / 1996 sous type H5N1, et en particulier la clade 2.3.4.4b, a provoqué des cas chez l'homme et a un potentiel évolutif important, à l'origine de plusieurs panzooties chez les oiseaux. Il y a actuellement un maintien de la circulation des virus en avifaune sauvage très important, notamment au niveau local et depuis plus d'un an.
- Il y a un nombre élevé d'évènements de franchissement de la barrière d'espèce des oiseaux aux mammifères (plus de 28 espèces de mammifères différentes contaminées) qui favorise la sélection de souches de virus IA possédant une virulence et une capacité de transmission accrue chez les mammifères.
- Une vigilance renforcée est nécessaire pour maitriser et anticiper le risque zoonotique à l'interface entre l'être humain et l'animal et entre le porc et la volaille.
- Rappel des équipements de protection individuel nécessaires pour les personnes exposées et lors des opérations de dépeuplement.